lundi 9 novembre 2009

Génération autrichienne

Selon Google Trends, la recherche du terme “Austrian Economics” a augmenté significativement depuis 2007. L’école d’économie dite “autrichienne” fait référence à une longue lignée d’économistes de tradition libérale classique qui, avant la deuxième guerre mondiale, était centrée à l’Université de Vienne. Tout au long du XXe siècle, cette école est restée largement en marge du courant principal de la théorie économique occidentale, dominée par les idées de Keynes, puis de Friedman. Cependant, les deux bulles successives des dotcom et de l’immobilier ont ranimé l’intérêt envers les théories de l’école autrichienne, en particulier celles d’un de ses piliers, Ludwig Von Mises (1881-1973). En effet, Mises proposa en 1912, dans “The Theory of Money and Credit” (mis à jour en 1953), que les crises économiques apparaissent comme la conséquence inévitable des booms artificiels créés par la manipulation de la monnaie et des taux d’intérêt par les banques centrales.

L’école autrichienne semble recruter actuellement des adeptes en grand nombre chez les jeunes étudiants américains. Ceux-ci ont, par exemple, joué un rôle de premier plan au cours de la campagne pour l’investiture républicaine à la présidence de Ron Paul. Peut-être attirés au départ dans les assemblées politiques sur les campus par les positions de Paul en faveur de la décriminalisation de la marijuana et par son antimilitarisme, les collégiens en ressortaient en scandant “End the Fed” et en brûlant des billets de 1$! Le titre du dernier livre de Paul lui aurait été inspiré par ce cri de ralliement. Paru en octobre, “End the Fed” est déjà un succès de librairie, suivant ainsi celui des ouvrages de deux autres “autrichiens”: “Crash Proof” de Peter Schiff (2007) qui en est à sa deuxième édition, et “Meltdown” de Thomas Woods (2009) dont nous parlions plus bas et qui a atteint la 11e position sur la liste des bestsellers du New York Times.

Il ne reste plus qu’à espérer pour eux qu’un expert en branding trouve un autre nom pour remplacer le terme “Austrian Economics”. Comment peut-on espérer convaincre un Américain moyen que la crise financière ait quelque chose à voir avec un aussi petit pays que l’Autriche?!

La vidéo présente Ron Paul, membre du comité de la Chambre sur les services financiers, donnant une leçon d’économie "autrichienne" à Ben Bernanke, le président de la Fed, 7 mois avant la crise de septembre 2008. La vidéo a été vue 221 000 fois.

mercredi 4 novembre 2009

It's the Fed, stupid!

Je concluais mon papier « Comprendre le PCAA », en écrivant que David Li et ses collègues - les mathématiciens de Wall Street - ne sont pas plus à blâmer pour la crise financière que les frères Wright sont responsables du 11 septembre 2001. Je suggérais plutôt de regarder du côté de la turpitude morale de leurs patrons. Dès les premières pages de « Meltdown », l’historien Thomas E. Woods pousse la rhétorique d’un cran en écrivant que de blâmer l'avidité (le «greed») pour la crise est comme mettre la faute d’un écrasement d’avion sur la gravité.

Après avoir consacré de nombreuses pages aux diatribes habituelles contre le Community Reinvestment Act, les programmes d’accès à la propriété, la discrimination positive, Fannie et Freddie, les mythes du New Deal, etc. – pour, à la fin du livre, conseiller aux néoconservateurs de laisser tomber ce discours cul-de-sac – Woods s’attaque enfin à la racine du problème. Ce qui a permis à l'avidité de s’exprimer aussi librement, c’est la manipulation du marché de l’argent par la Federal Reserve et l’aléa moral que constitue la garantie gouvernementale implicite de secourir les institutions financières «trop grosses pour faillir». À ce sujet, il rappelle que le Federal Reserve Act a été écrit en 1910 par un groupe de banquiers afin d’éviter une répétition de la panique bancaire de 1907 et que se serait bien la seule fois de l’histoire qu’un lobby aurait placé l’intérêt public avant le sien.

Woods présente un excellent exposé de la théorie des cycles économiques proposée par l’école dite «autrichienne» (plus là-dessus dans un prochain post) ainsi que sur le rôle moteur de la Fed dans l’apparition, coup-sur-coup de la bulle des dotcom et de celle de l’immobilier. La réponse du gouvernement américain à la crise actuelle (création de monnaie ex-nihilo et endettement) ne fait que favoriser l’apparition d’une nouvelle bulle. D’ailleurs, selon un article du Wall Street Journal d’aujourd’hui même, ce serait déjà commencé. De l’éducation économique à son meilleur.

mercredi 28 octobre 2009

Justice poétique?

Tous les québécois connaissent bien l’histoire de l’infâme avare Séraphin Poudrier (dessin de Serge Chapleau ci-contre) qui, à la fin du roman «Un homme et son péché», meurt brûlé vif dans l’incendie de sa maison en tentant de récupérer son or caché au grenier (1). Cette ironie du sort est un bel exemple d’un procédé littéraire appelé justice poétique. Eh bien, figurez-vous que la Cour Suprême du Kansas a rendu le 28 août 2009 un jugement-phare qui risque de donner à la bulle des hypothèques subprime un dénouement semblable.

Comme on le sait, le droit fondamental à la propriété privée exige, pour pouvoir être exercé en pratique, que le titre de propriété ainsi que tout lien hypothécaire ou servitude soient enregistrés auprès d’un greffe public. Mais, pour éviter d’avoir à se présenter au bureau d’enregistrement local à chaque fois qu’une hypothèque changeait de main, les prêteurs hypothécaires américains ont créé le Mortgage Electronic Registration System (MERS). Dans ce système, l’hypothèque était initialement enregistrée au nom MERS, et non à celui de l’institution prêteuse. Cette dernière pouvait donc ensuite vendre sa créance à un autre membre du MERS, sans avoir - du moins le croyait-elle - à faire enregistrer le nom du nouveau titulaire de l’hypothèque.

Mais la Cour Suprême du Kansas a jugé que le MERS n’est pas, au sens de la loi, un agent du prêteur car, selon elle:

"The relationship that MERS has to [to holder of a loan] is more akin to that of a straw man than to a party possessing all the rights given a buyer [of a loan]."

Ceci implique, en autres, que le MERS ne peut entamer des procédures de liquidation pour les 60 millions de titres hypothécaires viciés où il est nommé comme titulaire. Pour récupérer son prêt, le véritable créancier doit donc se présenter devant un juge et prouver qu’il en est l’actuel détenteur, ce qui peut lui coûter plusieurs milliers de dollars en frais juridiques, d’autant plus qu’il semblerait que la documentation gardée par le MERS soit très déficiente et truffée d’erreurs.

Ce jugement a déjà des conséquences. Le 9 octobre dernier, un juge de la cour des faillites du Southern District of New York a, devant le fouillis de paperasse mal remplie et/ou manquante, refusé de reconnaître PPH Mortgage comme détenteur d’une créance de plus de 400 000$ enregistrée au nom du MERS. Le juge a même déclaré la propriété free and clear de tout lien hypothécaire.

Enfin! Un point à mettre dans la colonne de Thomas Jefferson.

(1) Séraphin était peut être avare, mais il n'était pas fou. Il n'avait aucune confiance à long terme dans la monnaie de papier.

lundi 26 octobre 2009

La bulle des bulbes

Au cours des derniers mois, la bulle spéculative du prix des bulbes de tulipe de 1636-37 en Hollande a souvent été évoquée - y compris par l’auteur de ces lignes - comme un des nombreux cas de crise économique, imputable à l’avidité des uns et à l’exhubérance irrationnelle des autres. En y regardant de plus près cependant, il est permis de croire que le bailout des spéculateurs par le gouvernement hollandais a, sinon causé, exacerbé cette crise et que le marché n’est peut-être pas aussi irrationnel qu’on aime parfois à le croire. Earl A. Thompson, un économiste de l’école du Public Choice et professeur d’économie à UCLA, a publié en 2007 un article très intéressant sur le sujet.

En octobre 1636, la victoire - inattendue - de la France et de la Suède sur les Allemands marque un point tournant de la Guerre de Trente Ans faisant craindre aux producteurs de bulbes de tulipe hollandais l'effondrement de l’important marché d'exportation allemand. Le prix des bulbes baisse donc d'environ 75%. Mais, pour éviter la ruine des marchands qui détenaient des contrats à terme sur les bulbes livrables en 1637, le gouvernement hollandais annonce qu'il pourrait permettre que les contrats à terme soient rétroactivement convertis en simples options d’achat. Les rumeurs commencent à courir que le prix d’exercice de ces options serait entre 0% et 10% du montant du contrat à terme, sans égard à la valeur des bulbes sur le marché au comptant. S’amorce alors la fameuse bulle spéculative, qui ne porte pas tant directement sur le prix des bulbes que sur le résultat des négociations entre le gouvernement et la guilde des producteurs de bulbes, évidemment opposés à une telle mesure.

Tout au cours de l’hiver, le prix des contrats à terme explose donc par un facteur de 20. Finalement, le 3 février 1637, la guilde des producteurs annonce qu’elle accepte de convertir les contrats à terme en options d’achat dont le prix d’exercice est fixé à 3,5% du prix du contrat, mais seulement pour les contrats signés après le 30 novembre 1636. Le parlement entérine cette décision le 24 février, la «spéculation» prend bientôt fin et, en mai 1637, les prix reviennent à ceux d’octobre 1636. Thompson démontre très bien que le prix des contrats à terme durant l’hiver 1636-37 étaient parfaitement en accord avec la théorie des options et qu’on ne peut pas véritablement parler de spéculation irrationnelle.

Mes remerciements à Gilles Dryancour qui a attiré mon attention sur l’article de Thompson dans son article publié sur l’excellent site de l’Institut Turgot.

Earl A. Thompson: The Tulipmania: Fact or Artifact?

vendredi 23 octobre 2009

Souffrez-vous de chrématophobie?

Pour la plupart des gens, même parmi les mieux instruits, la nature intrinsèque de l’argent est un mystère total leur inspirant une crainte des pouvoirs du Prince qui, derrière la façade de temple grec de sa Banque, dispose du droit régalien de battre (et de contrefaire) monnaie. Si vous souffrez de chrématophobie – une peur irrationnelle de l’argent – la lecture du livre The Mystery of Banking de Murray Rothbard, dont le Mises Institute publie une nouvelle édition très soignée, pourra être utile à votre thérapie.

Dans son style autant limpide que lapidaire, Rothbard y explique d’abord, exemples simples de bilans à l’appui, l’évolution et le fonctionnement du système bancaire actuel et le rôle central qu’il joue dans l’apparition, puis l’éclatement, des bulles spéculatives. Il dresse ensuite l’histoire de la banque centrale des États-Unis: des deux tentatives du XIXe siècle qui se sont terminées par des épisodes de dépression économique, sur un fonds de scandale politico-financier, jusqu’à la création, en 1913, de la Federal Reserve qui ne fait depuis que pelleter les récessions dans la cour de la prochaine cuvée de politiciens. Pour vous donner une idée de ce que pense Rothbard de cette vénérable institution, il commence son historique ainsi:

«How did this momentous and fateful institution of central banking appear and take hold in the modern world? Fittingly, the institution began in the late seventeenth century England, as a crooked deal between a near-bankrupt government and a corrupt clique of financial promoters. »

On peut commander The Mystery of Banking, pour la modique somme de 20 USD, ici.
Le texte complet est disponible gratuitement ici en version pdf.

jeudi 22 octobre 2009

Une note salée

Les journalistes de Bloomberg, Mark Pittman et Bob Ivry, tiennent le compte des montants autorisés et déboursés à date par le gouvernement fédéral américain dans le sauvetage du secteur financier, nets des remboursements déjà effectués. En date du 25 septembre, le total était de 3.0 trillions $ (un trillion = mille milliards), réparti entre la Federal Reserve (1.6 trillions $), le Departement of the Treasury (1.1 trillions $) et la Federal Deposit Insurance Corporation (0.3 trillion $). Et on est encore loin du total des montants autorisés qui est de 11.6 trillions $. Le coût du bailout atteint ainsi à date presque celui, en dollars d’aujourd’hui, de la Deuxième Guerre Mondiale.

Par ailleurs, un coup d’œil au bilan de la Fed nous apprend qu’elle continue à pomper des milliards dans le marché des titres adossés à des hypothèques subprime. La Fed détient actuellement près de 800 milliards $ de ces titres «toxiques» et prévoit atteindre le maximum autorisé de 1.25 trillions $ en avril 2010. Où la Fed prend-elle cet argent? Très facile: elle l’imprime!

Tableau détaillé des coûts du bailout

mercredi 21 octobre 2009

The Warning

PBS a diffusé le 20 octobre dernier un troisième épisode de la série Frontline consacré à la crise financière. Cet épisode, intitulé "The Warning", relate les vains efforts de Brooksley Born (ci-contre), présidente de la Commodity Futures Trading Commission de 1996 à 1999 pour réglementer les produits dérivés transigés hors-bourse. Elle était dès lors convaincue que les risques que les banques encourraient sur ce marché opaque allaient un jour ou l’autre terrasser le système financier. Comme on le sait maintenant trop bien, elle perdit une lutte inégale face au formidable triumvirat formé de Greenspan (Federal Reserve), Levitt (Securities and Exchange Commission) et Rubin (Treasury), opposés à toute règlementation, même après la déconfiture du fonds spéculatif Long Term Capital, 10 ans (!) presque jour pour jour avant l’Armageddon financier de septembre 2008.

On y voit, à la fin, un Greenspan au visage défait reconnaître avoir eu une «vision du monde erronée» et un Levitt contrit affirmant: «I could have made a difference… I did not».

L’émission jette aussi - un peu - de lumière sur le parcours de sycophante de Greenspan, un économiste libertarien qui, dans la mouvance Reaganienne, s’est retrouvé à diriger une institution qu’il avait jusque-là abhorrée. Il faut quand même reconnaître que sa gestion de la Fed a effectivement donné tous les arguments nécessaires à ceux qui réclament maintenant son abolition!

mardi 6 octobre 2009

Marchés noirs et mélancolie

Les professeurs québécois Yvan Allaire (HEC) et Michaela Firsirotu (UQAM) signent un ouvrage fort intéressant dont le titre, Black Markets and Business Blues, indique bien qu'il traite de beaucoup plus que la crise financière actuelle. La première partie du livre est en effet consacrée à une chronique raisonnée de l’évolution de l’entreprise nord-américaine au cours du dernier quart de siècle. À l’aide de nombreux exemples, ils montrent comment nombre d’entreprises nord-américaines se sont transformées d’organisations fondées sur un contrat social engageant la loyauté des parties prenantes en arènes financières où hauts-dirigeants, actionnaires de passage et autres resquilleurs tentent de s’enrichir rapidement.

La deuxième partie est elle consacrée plus directement à l’actuelle crise financière. Les auteurs y expliquent bien comment le marché de produits financiers complexes comme ceux des Credit Default Swaps et des Synthetic Collaterized Debt Obligations, alimenté en grande partie par les fonds spéculatifs, a pu faire encourir à l’ensemble de l’économie, et à l’abri de toute règlementation, des risques systémiques énormes, avec les résultats que l’on sait.

Les auteurs reconnaissent d’emblée qu’on ne reviendra pas à l’ancien modèle de l’entreprise et qu’il est même douteux que les États-Unis adoptent des réformes institutionnelles importantes. Ils y vont tout de même plusieurs suggestions qui pourraient permettre au capitalisme de trouver une nouvelle voie ailleurs dans le monde: interdiction de la rémunération variable par voie d’options d’achat d’actions, période minimum de détention d’actions pour exercer un droit de vote, actions à droit de vote multiple, interdiction aux fonds de pension de mandater des gestionnaires externes demandant plus de 2% d’honoraires – ce qui aurait comme effet de faire disparaître un très grand nombre de fonds spéculatifs – , développement des coopératives dans certains secteurs comme les services financiers, etc.

M. Allaire est président de l'Institut sur la gouvernance des organisations privées et publiques.

Black Markets and Business Blues disponible de Chapters.ca

lundi 5 octobre 2009

The Pursuit of Happiness

Il nous a été récemment donné de visiter le magnifique campus de l’Université de Virginie fondée par Thomas Jefferson en 1819 et maintenant classé au patrimoine mondial. En arpentant ces lieux, d'où le pursuit of happiness émane de chaque brique, on ne peut que se demander ce que Jefferson aurait, en son temps, fait de plus s’il avait su que la noble entreprise humaine de la révolution américaine pourrait un jour conduire à l’édification d'un château de cartes en hypothèques subprime, momentanément rendues abordables par des teasers rates, eux-mêmes rendus possibles par la manipulation du marché de l'argent - supposément pour le bien commun - par une banque d’état.

On peut croire que Jefferson, qui a toujours combattu l’intervention de l’état dans l’économie et particulièrement la création d’une banque centrale, se serait opposé encore plus férocement aux idées d’Alexander Hamilton, protégé de Georges Washington et premier Secrétaire au Trésor des États-Unis. La vision de l’Amérique d’Hamilton était mercantiliste - une nation d’affairistes supportés par l’État - alors que celle de Jefferson, beaucoup plus romantique, était celle d’une nation d’agriculteurs et d’artisans indépendants lisant Homère dans le texte original. Bien que la suite de l'Histoire ait vu le triomphe à peu près total de la vision d'Hamilton, la prochaine crise économique donnera peut-être le dernier mot à Jefferson, lui qui écrivait en 1813:

« It is a [disputed] question, whether the circulation of paper, rather than of specie, is a good or an evil... I believe it to be one of those cases where mercantile clamor will bear down reason, until it is corrected by ruin. »

Un extrait de l'émission The American Experience portant sur la dure bataille entre Jefferson et Hamilton:

The American Experience: Jefferson Vs. Hamilton

jeudi 1 octobre 2009

Mr. Schiff Goes to Washington

L'investisseur et économiste Peter Schiff a récemment annoncé sa candidature aux élections de 2010 en tant que Sénateur du Connecticut. Il fera campagne contre le démocrate Chris Dodd, actuel président du comité sénatorial sur les banques, le logement et les affaires urbaines. Il résume ainsi sa pensée politique: "I believe in three things that we haven't had for a long time in this country: the rule of law, respect for private property and sound money."

La vidéo présente une conférence qu'il donnait en septembre 2006 devant la Mortgage Bankers Association, réunie en congrès dans un endroit on ne peut plus à propros - un casino de Las Vegas. Communicateur efficace, M. Schiff y explique clairement les sources du boom immobilier et prédit correctement son éclatement imminent. Il remonte notamment aux politiques de la Federal Reserve au lendemain de l'éclatement de la bulle des dotcom et y expose les pratiques douteuses de son auditoire "d'originateurs-revendeurs" de prêts hypothécaires. On y apprend, entre autres, qu'un laveur de vaisselle demandant un prêt pour l'achat d'une maison de 500 000$ pouvait déclarer 120 000$ de revenus annuels, soit 20 000$ en salaire de son emploi plus 100 000$ provenant de l'appréciation annuelle présumée à 20% de la propriété! À un certain moment, Schiff demande que ceux qui détiennent toujours les prêts qu'ils ont ainsi approuvés lèvent la main. La salle éclate de rire!

Comme beaucoup d'autres, Peter Schiff blâme la bulle immobilière sur la Fed d'Alan Greenspan, dont les politiques monétaires ne sont qu'une suite de paris à "quite ou double" depuis le début des années 1990. Il conseille donc maintenant aux investisseurs d'éviter tout investissement en dollars américains à cause de l'énorme dette extérieure des États-Unis.

Conférence de Peter Schiff

mardi 23 juin 2009

Le coup d'état tranquille

Simon Johnson, professeur au Sloan School of Management du Massussuchets Institute of Technology (MIT) et ancien économiste en chef du Fonds Monétaire International (FMI) signe un article plutôt incendiaire dans l’édition de mai 2009 du Atlantic Monthly où il qualifie le bailout du secteur financier de coup d’état tranquille du complexe politico-financier américain.

Johnson voit une similiarité entre la crise financière américaine et celles qui amènent régulièrement des pays aux économies émergentes à solliciter l’aide de dernier recours du FMI. Il compare les capitaines de la finance américaine aux croonies des républiques de bananes qui, tôt au tard, finissent toujours par faire éponger leurs déboires par le trésor public. Son expérience au FMI lui indique que la seule manière d’implanter les réformes nécessaires dans les pays en difficulté économique est de les forcer à se débarasser de leur oligarchie financière.

Il faudra sans aucun doute attendre que le dollar américain s’écroule complètement avant de voir arriver un tel Day of Reckoning !

The Atlantic Monthly: The Quiet Coup

vendredi 19 juin 2009

Vers un retour au Gold Standard?

La détoriation du bilan de la Federal Reserve depuis septembre 2008 suscite la crainte que les graines de la prochaine crise économique soient déjà semées. Cette crise résulterait d'une perte de confiance massive dans la valeur du dollar américain qui sert de médium d'échange entre les banques centrales depuis l'abandon définitif, en 1971, des taux de changes fixes basés sur l'étalon or.

La crise financière actuelle remet ainsi à l'agenda un sujet considéré tabou: le retour à la discipline fiscale et monétaire qu'impose la stricte adhésion au Gold Standard. Comme très peu d'économistes défendent présentement cette idée, les nombreux écrits de Murray N. Rothbard, décédé en 1995, sont actuellement en vogue chez les jeunes américains qui se demandent, à juste titre, comment, en plus des déficits engendrés par la crise actuelle, ils parviendront à payer les 100 trillions en programmes sociaux que leurs parents se sont promis en leur nom.

Rothbard fut un des maîtres à penser du mouvement libertarien et longtemps considéré comme un extrémiste, sinon carrément un crackpot. En bref, Rothbard prône l’abolition du fractional reserve banking - qui permet aux banques de garder en réserve moins que l'argent que les déposants leurs ont confié et d'en prêter sans leur autorisation la plus grande partie. Selon lui, ce système bancaire actuel n’est rien de moins que de la fraude. D’ailleurs, il est intéressant de savoir que des banquiers pratiquant le fractional reserve furent à 3 reprises condamnés pour fraude en Angleterre au XIXe siècle et que c’est finalement le House of Lords qui le légalisa. Cependant, ce système est intrinsèquement intenable et les crises financières successives qui en découlèrent amenèrent la création des banques centrales - la nationalisation de l'argent - menant inévitablement à l'abandon "temporaire" du gold standard en 1933, puis définitif en 1971. Les bulles économiques qui ont suivi depuis ne sont que des sous-bulles de la super-bulle du fiat money qui risque bien d'être à la prochaine éclater.

L'abolition du fractional reserve banking rendrait les banques centrales inutiles et, dans un marché de l'argent libre, l'or s'imposerait probablement comme médium d'échange, tout comme l'acier s'est imposé pour la construction de ponts.

Le texte de la première partie du livre de Rothbard "What Has Goverment Done to Our Money?" se trouve ici:

What has Government Done to Our Money?

jeudi 18 juin 2009

Dans les coulisses du 15 septembre 2008

PBS a diffusé le 17 juin un excellent reportage de la série Frontline sur les dessous de l'acquisition de Merrill Lynch par Bank of America, orchestrée par le Secrétaire au Trésor Henry "Hank" Paulson au cours du fatidique week-end des 13 et 14 septembre 2008. Paulson était décidé à laisser Leahman Brothers faire faillite le lundi suivant mais croyait que l'acquisition de Merrill Lynch aurait pour effet de mitiger la réaction des marchés à cette faillite.

La réaction des marchés fut toutefois si désastreuse que, dès jeudi le 18, Paulson du littéralement se mettre à genoux dans le bureau de Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des Représentants, implorant les législateurs de débloquer 800 milliards avant l'ouverture des marchés du lundi suivant afin d'empêcher le système financier de s'écrouler complètement.

Frontline: Breaking The Bank

Un autre épisode de la série Frontline présente une excellente chronique de la crise financière:

Fontline: Inside The Meltdown

Publication du Livre Blanc sur la réforme de la règlementation financière

L’administration américaine a publié le 17 juin 2009 un Livre Blanc sur la réforme de la règlementation financière. Trois mesures s’adressent directement aux causes de la crise des PCAA :


  • Titrisation de créances
    Les originateurs – ceux qui acceptent une créance et qui la revendent par la suite – devront conserver un intérêt économique dans la performance subséquente du prêt. Ceci devrait décourager l'acceptation et la revente de prêts indument risqués.
  • Surveillance des agences de notation
    La Securities and Exchange Commission (SEC) aura le pouvoir d’exiger des agences de notation qu’elles dévoilent leurs politiques et méthodes, particulièrement en matière de conflits d’intérêt. L’utilisation des cotes de crédit comme critère de décision réglementaire sera réduite "autant que possible".
  • Réglementation du marché des Credit Default Swaps
    La SEC aura l’autorité de règlementer le marché des Credit Default Swaps. Tout contrat d'assurance-crédit sera considéré réglementable.

Alan Grayson: maître de l'interrogatoire!

Alan Grayson, membre du comité de la Chambre des Représentants sur les services financiers, interroge Elizabeth Coleman, Inspectrice générale de la Federal Reserve. La faiblesse du témoignage laisse songeur sur la qualité du personnel de la Fed. Elle donne des arguments à ceux qui pensent que la crise financière est, avant toute chose, le fait de l'incompétence des autorités réglementaires et, sourtout, que la Fed est en train de jeter les bases de la prochaine crise: celle du système monétaire mondial lui-même.

Témoignage d'Elizabeth Coleman

Alan Grayson fait ici passer un mauvais 2 minutes et 25 secondes - ce qui a du lui sembler comme un quart d'heure - à Edward Liddy, le CEO d'AIG.

Témoignage d'Edward Liddy

Enfin, Alan Grayson interroge des témoins au sujet des règles de mark-to-market. M. Herz, Président du conseil du Federal Accounting Standards Board admet que les institutions qui demandent d'être exemptées de ces règles sont habituellement celles qui déclarent faillite 15 jours plus tard.

Témoignage de Robert Herz

mardi 2 juin 2009

Hypothèques subprime - California style

Le rêve américain et les hypothèques subprime: un phénomène social:

Foreclosure Alley - SoCal Connected

vendredi 29 mai 2009

Comprendre le PCAA

Bienvenue à ce blog!

La Caisse de Dépôt et Placement du Québec a englouti plusieurs milliards de nos épargnes dans des instruments financiers qui se sont avérés totalement illiquides. Pour expliquer cette débâcle, on entend parfois dire que le ce fameux Papier Commercial Adossé à des Actifs (PCAA) est un instrument financier trop complexe pour être compris, même par les dirigeants d'institutions financières pourtant réputées. On entend aussi souvent ceux qui ont été "sauvés" de la débâcle affirmer qu'ils avaient choisi de pas investir dans les PCAA parce qu'ils n'y comprenaient rien.

Ce qui est dommage est que, dans le sillage de ces assertions, de nombreux « gens d’affaires » québécois, dans un discours renvoyant au mythe du Péché Originel, semblent maintenant vouloir élever la non-compétence en matière financière au rang de vertu salvatrice.

Le premier objectif du texte attaché est de montrer que les PCAA, ce n’est pas de l’astroballistique. Ce sont des instruments financiers qui devraient être parfaitement compréhensibles pour une «personne d’affaires» moyenne, car les concepts de base en cause ne dépassent pas le niveau de cours d’introduction en statistiques (le proverbial cours de Statistiques 101).

Le deuxième objectif est de faire comprendre que les mathématiques n’ont rien à voir avec la déroute des PCAA. Il faut plutôt, comme malheureusement pour toutes les crises financières de l’histoire de l’humanité, chercher du coté de la cupidité et du laissez-faire, les nourrices de la malhonnêteté des uns et de l’exubérance irrationnelle des autres.


Pour lancer la discussion, vous trouverez ci-dessous un lien qui vous conduira à un texte sur les PCAA.

http://sites.google.com/site/lepcaa/